Formation en emploi

La CSD prend à cœur la formation : chaque travailleuse et chaque travailleur doit être adéquatement formé.e afin de pouvoir se réaliser à travers son emploi et d’être mobile sur le marché de l’emploi. La CSD intervient à ce titre auprès des divers acteurs de la formation et revendique la bonification des politiques de formation au Québec, l’amélioration des services de formation et une meilleure offre régionale de cette dernière.

La formation en emploi, un incontournable dans une économie qui se transforme

Pour tirer notre épingle du jeu à travers la mondialisation de l’économie, la transformation du travail et l’accès pour les travailleuses et aux travailleurs à des emplois de qualité, il est incontournable que celles-ci et ceux‑ci soient doté.e.s d’une formation adéquate. Le marché de l’emploi étant constamment traversé par de nombreux changements et dans la mesure où nous œuvrons dans une économie qu’on qualifie « du savoir », la capacité d’acquérir de nouvelles connaissances et de nouvelles compétences est essentielle pour s’y tailler une place de choix.

Pour la CSD, toute activité de formation idéalement être :

  • Qualifiante: La formation permet d’acquérir des compétences spécifiques.
  • Transférable: Le contenu de la formation peut être transféré d’une tâche à une autre, ou d’un milieu de travail à un autre.
  • Reconnue: La formation permet d’accéder à d’autres formations.

Or, la formation reste un enjeu peu souvent pris au sérieux par les employeurs. La recherche du profit à court terme prenant le dessus sur la formation, le Québec reste encore une des provinces canadiennes où les entreprises investissent le moins en formation, ce qui entraine comme conséquence que les entreprises québécoises sont moins productives.

Cela étant dit, si la formation en emploi vise à augmenter la productivité des entreprises par le biais d’une main‑d’œuvre qualifiée, le fait de posséder une solide formation est tout autant essentiel pour les travailleurs et les travailleuses. La main-d’œuvre ne doit pas faire les frais des mutations du marché de l’emploi ou se retrouver dans une situation difficile à cause d’un niveau de qualification peu élevé. En témoigne le fait que l’économie du Québec connaît un virage numérique sans précédent. Alors qu’il se crée davantage d’emplois demandant des qualifications importantes, tandis que la création d’emplois peu qualifiés recule, il serait injuste que des individus perdent leur emploi ou aient de la difficulté à en trouver un nouveau parce qu’ils n’ont pas été suffisamment formés à utiliser des outils informatisés. Être bien formé est donc essentiel pour que la main-d’œuvre actuelle puisse suivre la tendance.

En 2019, il s’est créé 77 000 emplois au Québec :

  • 34 000 emplois peu qualifiés ont été perdus ;
  • Tandis que 111 500 emplois qualifiés et très qualifiés ont été créés.

Autrement dit, la formation doit être axée sur les besoins de la main-d’œuvre afin que cette dernière puisse être autonome et s’adapter aux évolutions du marché de l’emploi. La solution est que la formation doit être qualifiante, transférable et reconnue. Sans s’assurer de ce standard, la formation risque de ne pas être réellement bénéfique pour la main-d’œuvre.

Il faut aussi s’assurer que tous et toutes bénéficient d’une formation de base suffisante. La situation québécoise à cet égard est toutefois alarmante. Les plus récentes données nous révèlent qu’une part importante de la main-d’œuvre québécoise est insuffisamment éduquée et que ses compétences en lecture et en calcul sont en deçà des exigences du marché de l’emploi. Cette portion de la main-d’œuvre québécoise est particulièrement à risque de subir les contrecoups d’un aléa personnel ou économique, car se former ou développer de nouvelles compétences est d’autant plus difficile qu’elle doit aussi surmonter ses difficultés en littératie (lecture), en numératie (calculs) et en compréhension des technologies.

Enquête réalisée en 2015 au Québec, le Programme pour l’évaluation internationale des compétences des adultes (PEICA) révèle que :

  • 19% de la population québécoise a des difficultés majeures en littératie;
  • 21,5% en numératie;
  • Et 50,4% en littératie numérique.

Au Québec, la responsabilité de la formation revient avant tout aux entreprises privées, et l’État a pour rôle de s’assurer que cette responsabilité soit respectée. Nous ne visons ni plus ni moins que la réelle instauration d’une culture de formation au sein des entreprises, où employeurs, travailleurs et travailleuses se concertent pour que la main-d’œuvre de chaque milieu de travail soit adéquatement et continuellement formée. Tout le monde ne peut qu’en sortir gagnant.

Bonifions la Loi du 1 % et consolidons le réseau de la formation au bénéfice de la main-d’œuvre québécoise

Le Québec s’est doté en 1995 d’une loi ambitieuse, la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d’œuvre, remplacée en 2007 par la Loi favorisant le développement et la reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre, toutes deux connues aussi comme la « Loi du 1 % ». L’objectif de la Loi du 1 % est de rattraper le retard de formation de la main-d’œuvre du secteur privé et vise à instaurer une réelle culture de formation au sein des entreprises. Cette loi décrit les obligations de l’employeur en matière de formation, notamment en disposant que l’employeur doit investir annuellement un certain pourcentage de sa masse salariale en formation aux employé.e.s ou en versements au Fond de développement et de reconnaissance des compétences de la main-d’œuvre (FDRCMO). Grâce au FDRCMO, Québec finance des activités de formation bénéficiant à la main-d’œuvre québécoise.

Qui plus est, la gestion du FDRCMO a toujours été l’objet d’un partenariat entre les syndicats et les différents acteurs du marché du travail au sein de la Commission des partenaires du marché du travail (CPMT). Ce partenariat vise à trouver un terrain d’entente entre les partenaires afin de décider des orientations futures de la formation.

Malheureusement et malgré des résultats positifs incontestables, la Loi du 1 % a été a de maintes reprises attaquées et réduites. Le gouvernement, faisant la belle oreille aux plaintes du patronat voulant que la Loi du 1 % soit trop contraignante et coûteuse, a considérablement réduit les critères d’assujettissement des entreprises. Les PME en sont ainsi exemptées depuis 2003, tandis que le projet de loi 70, adopté en 2016, a relevé le seuil d’assujettissement de masse salariale à 2 millions de dollars. Suite au PL70, une réduction du nombre d’entreprises assujetties a été immédiatement observable. Il faut renverser cette tendance pour que davantage d’entreprises soient visées par cette loi.

Les réformes du PL70 en 2016 ont causé la réduction de 12M en cotisations versées par les employeurs au FDRCMO. Suite au PL70, d’environ 16 143 entreprises assujetties, il n’en restera qu’environ 8 000.

Pour contrer la perte de revenus du Fond, Québec finance depuis 2016 la différence perdue. Ce faisant, le gouvernement oriente certaines priorités de la formation pour favoriser des secteurs de l’économie jugés prioritaires, c’est-à-dire selon les besoins des entreprises, et en favorisant des rapprochements entre le milieu de l’éducation et les entreprises. Or, agir ainsi dénature l’action du réseau de la formation. En effet, les intérêts des entreprises sont favorisés au détriment de ceux des travailleuses et des travailleurs. On favorise de la sorte la formation d’une main-d’œuvre qui répond aux besoins particuliers des entreprises, mais dont la formation n’est ni vraiment qualifiante, transférable ou reconnue.

Outre la Loi du 1 %, c’est tout le réseau de la formation qui peut aussi être bonifié. Notamment, il faut le rendre plus flexible en instaurant une meilleure adéquation formation-emploi. L’adéquation formation-emploi réfère au fait de maintenir un bon niveau de formation adapté à l’évolution des exigences de l’emploi. En contexte de virage numérique, les habitudes de travail changent et les besoins de formation en emploi sont plus urgents que jamais. En accordant à la CPMT le rôle d’encadrer l’adéquation formation‑emploi, il sera possible d’accorder une plus grande marge de manœuvre aux travailleurs et aux travailleuses pour qu’ils et elles se forment sans nécessairement nuire au lien d’emploi avec leur milieu de travail.

Les entreprises ne se sentent pas suffisamment concernées par les besoins des travailleurs et des travailleuses. Pour s’assurer que tous et toutes puissent être autonomes et bien formé-e-s, il revient à l’État d’assumer pleinement la responsabilité d’encadrer un réseau offrant une formation qualifiante, transférable et reconnue à l’ensemble de la main-d’œuvre tout en favorisant l’instauration d’une réelle culture de formation au sein des entreprises.

Ce que la CSD revendique

Afin de renforcer et bonifier le réseau de la formation de la main-d’œuvre, la CSD revendique, notamment :

  • Bonifier la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d’œuvre afin de:
    • Forcer toutes les entreprises, peu importe leur taille, d’investir 2 % de leur masse salariale en formation, ce qui représente 1 semaine de formation par année par employé.e;
    • Resserrer les activités de formation admissibles afin que ce soient majoritairement les employé.e.s qui bénéficient d’une formation;
    • Garantir que tous les types d’emplois soient couverts par la Loi et qu’une attention spéciale soit portée aux personnes marginalisées du marché de l’emploi et aux personnes peu scolarisées;
    • S’assurer que l’ensemble des activités de formation mènent à une formation qualifiante, transférable et reconnue.
  • Augmenter le financement des services publics de l’éducation et de l’enseignement postsecondaire, afin de doter la main-d’œuvre d’une solide formation générale qui ne soit pas uniquement axée sur les besoins immédiats du marché de l’emploi et de combattre les problèmes de littératie et de numératie;
  • Implanter des mécanismes qui encouragent les employeurs à former leurs employé.e.s, par exemple en encadrant la conciliation famille-travail-étude dans les milieux de travail.

Les syndicats, des partenaires quant à la formation de la main-d’œuvre

Pour la CSD, les travailleurs et les travailleuses peuvent et doivent jouer un rôle de premier plan quant à la formation au travail. En effet, la formation est souvent réduite au droit de gérance des employeurs. Ces derniers vont préférer s’en tenir au strict minimum pour réduire les dépenses. Pourtant, les syndicats peuvent jouer un rôle positif pour changer les mentalités, s’assurer que la voix des travailleurs et des travailleuses dans les milieux de travail soit entendue et ainsi contribuer à instaurer une réelle culture de formation au sein des entreprises. De plus, comme l’accès à la formation contribue à l’accès à de meilleurs emplois, cela rejoint ainsi un objectif fondamental du syndicalisme : l’amélioration des conditions de travail et de vie des travailleurs et des travailleuses.

Notamment, rappelons que l’article 9 de la Loi du 1 % permet à l’employeur de se faire rembourser ses dépenses relatives à la formation s’il soumet un plan de formation ayant fait l’objet d’une entente entre l’employeur et le syndicat. Les syndicats ont ainsi tout intérêt à intervenir comme des partenaires auprès des employeurs. Cela dit, il y aurait aussi intérêt à ce que la Loi du 1 % soit modifiée pour inclure les syndicats comme des partenaires de la formation. Ce faisant, on s’assure d’un partenariat complet où la main‑d’œuvre et les employeurs peuvent travailler ensemble pour offrir des conditions de formation pertinentes et adéquates qui bénéficieront tant à l’entreprise qu’aux employé.e.s.

Ce que la CSD revendique

La vision de la CSD de l’implication syndicale quant à la formation en emploi consiste à:

  • Encourager les syndicats à négocier des clauses encadrant la formation des travailleurs et des travailleuses dans les conventions collectives;
  • Amender la Loi du 1 % pour qu’on y reconnaisse les syndicats comme un partenaire de la formation;
  • Contribuer à instaurer une culture de la formation dans tous les milieux de travail.